Cardiologie
Congrès scientifique de l’American Heart Association (AHA) de 2014
Les nouveaux inhibiteurs des récepteurs P2Y12 et le SCA : baisse des thromboses des endoprothèses et de la mortalité
Chicago – Une étude de 12 mois menée en situation réelle dans un seul centre de recherche a porté sur l’utilisation d’inhibiteurs des récepteurs P2Y12 chez plus de 6500 patients atteints d’un SCA. Or l’incidence des thromboses des endoprothèses et des décès associée à l’un des trois agents étudiés était plus faible que celle enregistrée avec les deux autres. Ces nouvelles observations portent à croire que le remplacement du traitement type par cet agent pourrait réduire de moitié le risque de thrombose de l’endoprothèse, une complication qui commande habituellement une nouvelle intervention ou qui peut même être fatale.
Le clopidogrel a été l’antiplaquettaire qui a dominé la dernière décennie. Cela dit, des essais cliniques déterminants sur le traitement d’entretien de patients atteints d’un SCA ont révélé que le prasugrel et le ticagrélor, deux nouveaux inhibiteurs des récepteurs P2Y12 pour voie orale, inhibent l’agrégation plaquettaire de manière plus marquée et plus constante que le clopidogrel. Comparé à ce dernier dans le cadre de l’essai PLATO, le ticagrélor a entraîné une réduction significative des manifestations ischémiques chez tous les patients atteints d’un SCA, y compris ceux qui avaient subi une intervention de revascularisation ou qui avaient reçu un traitement médical. Lors de l’étude TRITON-TIMI 38, une raréfaction significative des manifestations ischémiques a été observée chez tous les patients traités à l’aide de prasugrel, ce qui n’a pas été le cas lors de l’étude TRILOGY-ACS chez les patients atteints d’un SCA sans sus-décalage du segment ST traité par des méthodes médicales uniquement. Des chercheurs du Royaume-Uni ayant à leur tête le Dr Javaid Iqbal, de l’Université de Sheffield, ont étudié l’issue à 12 mois de traitements par trois inhibiteurs des récepteurs P2Y12 soit le clopidogrel, le prasugrel et le ticagrélor chez des patients atteints d’un SCA dans un centre régional de santé de la ville de Sheffield. « Il s’agit de la première étude réalisée en situation réelle et dans une population de patients recrutés à tous venants », a noté le Dr Iqbal. Les données ont été recueillies chez 6742 patients atteints d’un SCA, qui avaient été consécutivement orientés vers le laboratoire de cathétérisme cardiaque de 2009 à 2013. Tous ces patients (IM avec sus-décalage du segment ST dans 36 % des cas et SCA sans sus-décalage du segment ST dans 64 % des cas) ont reçu de l’AAS ainsi que du clopidogrel (67 %), du prasugrel (15 %) ou du ticagrélor (18 %). « Le choix de l’inhibiteur des récepteurs P2Y12 était calqué sur les changements apportés au fil du temps aux lignes directrices européennes », a expliqué le Dr Iqbal. Lorsque le ticagrélor est arrivé sur le marché en 2011, notre établissement a été l’un des premiers à l’utiliser chez des patients atteints d’un SCA.
Baisse significative des thromboses des endoprothèses
Selon le Dr Iqbal, l’incidence à 12 mois d’une thrombose avérée de l’endoprothèse était inférieure à 1 % chez les patients du centre de recherche qui ont reçu du ticagrélor. En outre, l’incidence de thrombose avérée ou probable de l’endoprothèse était significativement plus faible chez les sujets traités par ce médicament que chez ceux qui avaient reçu le clopidogrel ou le prasugrel (2,1 % vs 4,2 % et 4,5 %, p < 0,01) et elle l’est restée après ajustement en fonction des différences notées au chapitre des caractéristiques initiales entre les trois groupes de traitement (Fig. 1). L’évaluation des facteurs prévisionnels indépendants d’une thrombose de l’endoprothèse a mis au jour une réduction du risque de 13 % lorsque la comparaison opposait le prasugrel et le clopidogrel. De son côté, le ticagrélor a vraiment réduit ce risque de moitié comparativement au clopidogrel. L’AIT/AVC tenait lieu de facteur prévisionnel indépendant de thrombose de l’endoprothèse. « C’était important parce que le prasugrel est contre-indiqué chez les patients âgés de 75 ans ou plus ou qui ont déjà subi un AIT/AVC, mais ces sujets avaient moins de 75 ans et n’avaient pas d’antécédents d’AVC », a précisé le Dr Iqbal. En ce qui concerne la population dans son ensemble, la mortalité toutes causes confondues était significativement plus faible chez les sujets traités par le prasugrel et le ticagrélor que chez ceux ayant reçu du clopidogrel. « En comparant le prasugrel et le ticagrélor, nous avons constaté que les réductions de ce paramètre d’évaluation ne franchissaient pas le seuil de la signification statistique, les chiffres étant peu élevés, mais qu’une tendance semblait se dessiner quant à un effet exercé par le ticagrélor », a expliqué le Dr Iqbal. Il a conclu en ajoutant ceci : « Nos données nous portent à croire que le ticagrélor semble plus efficace pour raréfier la thrombose de l’endoprothèse. Nous ne disposons pas encore de données tirées d’essais avec répartition aléatoire pour le confirmer, mais pour l’heure, c’est ce que les données issues de notre analyse nous laissent entrevoir. »