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Dermatologie

Maui Derm Hawaï 2023

du 23 au 27 janvier 2023 / Maui, Hawaï

Psoriasis en plaques modéré ou grave : nouvelle classe d’agents extrêmement sélectifs par voie orale

Maui — L’état des lieux dressé lors du Congrès de dermatologie de 2023 à Maui a révélé que dans la liste toujours plus longue d’agents ciblés opposés au psoriasis modéré ou grave, les inhibiteurs de la tyrosine kinase 2 (TYK2) font preuve d’une sélectivité hors du commun pour la voie inflammatoire sous-jacente. La cible, la TYK2, médie plusieurs cytokines très étroitement liées à l’inflammation impliquée dans le psoriasis. Les études de phase III POETYK PSO-1 et POETYK PSO-2, qui ont mené à l’homologation du premier inhibiteur de la TYK2, ont mis au jour des taux d’efficacité élevés pour leurs paramètres d’évaluation sévères et la rareté des effets collatéraux. Aucune atténuation des bienfaits exercés n’est ressortie des nouvelles données issues de 2 années de suivi. Les inhibiteurs de la TYK2 se distinguent des autres agents ciblés, y compris les autres inhibiteurs de Janus kinase (JAK), par la spécificité de leur action.

Contrairement aux agents biologiques injectables qui inhibent au moins une cytokine générant de l’inflammation, les médicaments pour voie orale à base de petites molécules agissent plus tôt dans la cascade inflammatoire, selon la Dre April W. Armstrong, professeure de dermatologie à l’Université de Californie du Sud, à Los Angeles. Comme la transduction des signaux médiée par la famille des JAK, des enzymes intracellulaires, influence de nombreuses activités physiologiques, l’inhibition de certains sous-types de ces enzymes est l’occasion d’exercer des effets extrêmement ciblés. 

Pour une entrevue exclusive avec le Dr Steve Mathieu couvrant l’impact sur la pratique clinique, cliquez ici.

Importance des sous-types de JAK

« L’intérêt de ces agents vient du fait que la TYK2 assure la médiation des signaux de plusieurs des cytokines responsables du psoriasis », a affirmé la Dre Armstrong, en ajoutant que le mode d’action des inhibiteurs sélectifs de la TYK2 est suffisamment différent de celui des médicaments dont la sélectivité se porte sur d’autres sous-types de JAK pour qu’elle les considère comme uniques. Le deucravacitinib, un inhibiteur de la TYK2 récemment homologué et premier de sa classe thérapeutique, a peu d’effet, voire aucun, sur JAK1, JAK2 ou JAK3, alors que les inhibiteurs de JAK classiques, tels que le tofacitinib, n’exercent pratiquement aucune activité sur la TYK2 (figure 1).  

« L’intérêt de ces agents vient du fait que la TYK2 assure la médiation des signaux de plusieurs des cytokines responsables du psoriasis. »

« Il semble maintenant important d’éviter d’inhiber JAK2, un médiateur des nombreux effets collatéraux imputés aux autres inhibiteurs de JAK », a ajouté la Dre Armstrong.

La Dre Linda F. Stein Gold, directrice de la Recherche et chef de la Division de dermatologie, au Centre de santé Henry Ford, de Détroit, au Michigan, a renchéri sur ce point. Pendant la présentation qu’elle a donnée pendant le symposium TYK2 de Maui, la Dre Stein Gold a qualifié la TYK2 d’outsider par rapport aux trois autres grands sous-types de JAK. La sélectivité pour la TYK2 signifie « qu’il y a moins d’activités métaboliques collatérales dont il faut se préoccuper », a-t-elle affirmé en citant les études cliniques à l’appui de cette allégation. 

« [La sélectivité pour la TYK2 signifie] qu’il y a moins d’activités métaboliques collatérales dont il faut se préoccuper. »

La transduction des signaux par TYK2 est liée aux interférons de type 1 (alpha et bêta) de même qu’à la différenciation de TH17. On attribue à cette dernière l’inhibition des cytokines que sont l’IL-17, l’IL-12 et l’IL-23, qui sont toutes réputées jouer un rôle important dans la pathogenèse du psoriasis.

Le deucravacitinib, premier inhibiteur de la TYK2 homologué par des organismes de réglementation, sert à traiter les cas de psoriasis modéré ou grave que les agents topiques ne parviennent pas à maîtriser suffisamment. Il a été homologué à la lumière des résultats de deux études de phase III multinationales de conception similaire : POETYK PSO-1 et POETYK PSO-2. Des patients atteints d’une forme modérée ou grave de psoriasis y ont été répartis aléatoirement selon un rapport de 2:1:1 de façon à recevoir 6 mg de deucravacitinib une fois par jour, 30 mg d’aprémilast deux fois par jour ou un placebo. L’aprémilast, l’agent de comparaison actif, est un inhibiteur de la phosphodiestérase‑4 (PDE4) indiqué pour le traitement du psoriasis en plaques. Les paramètres d’évaluation relativement ambitieux de ces études étaient l’obtention d’un indice PASI de 75 (Psoriasis Area and Severity Index) et d’un score d’évaluation globale des médecins (sPGA) de 0 (disparition complète des lésions) ou de 1 (disparition presque complète des lésions). 

L’avantage de l’inhibiteur de la TYK2 sur le placebo et l’agent de comparaison est ressorti entre la 4e et la 6semaine de l’étude. À 16 semaines, le deucravacitinib se montrait significativement plus efficace que les deux autres produits pour l’indice PASI 75 et le sPGA de 0/1. À la 24e semaine, alors que les courbes du deucravacitinib affichaient toujours une pente ascendante, la proportion de sujets ayant obtenu un indice PASI 75 au cours des études POETYK PSO-1 et POETYK PSO-2 se révélait environ 70 % et 60 % plus élevée avec le deucravacitinib qu’avec l’aprémilast, respectivement (figure 2). L’avantage observé pour le sPGA de 0/1 était d’une ampleur comparable (figure 3). 

Les études de phase III concordent : les résultats sont significatifs

« Les taux similaires de réponse enregistrés pour ces paramètres d’évaluation relativement ambitieux s’étayaient mutuellement », a déclaré la Dre Armstrong, principale clinicienne-chercheuse de l’étude POETYK PSO-1. Les résultats des deux études ont été publiés dans le numéro de janvier 2023 du Journal of the American Academy of Dermatology (J Am Acad Dermatol 2023;88:29-39/J Am Acad Dermatol 2023;88:40-51).

Pendant l’étude POETYK PSO-LTE, une étude de prolongation de phase III, ouverte et de longue durée, la réponse des patients suivis se maintient jusqu’à ce jour. Soixante semaines après la fin des études, la proportion de sujets ayant obtenu un indice PASI 75 était légèrement plus forte que celle observée à la fin de la phase comparative, peu importe laquelle des trois méthodes d’analyse était appliquée (figure 4). Comme la phase de prolongation de longue durée ne comporte pas de comparaison avec d’autres traitements ciblés, il est difficile de conclure à une réponse relative plus soutenue. Cela dit, la perte d’une réponse au fil du temps est un phénomène fréquent avec les anticorps monoclonaux ciblant les cytokines.

L’inhibition allostérique de TYK2 en remplacement de l’inhibition catalytique

Le deucravacitinib a été un tournant dans la mise au point des inhibiteurs de la TYK2. Au début, c’est le domaine catalytique de la TYK2, qui possède une structure dimérique, qui était ciblé. Deux des premiers inhibiteurs de la TYK2, le brépocitinib et le ropsacitinib, qui ciblaient le domaine catalytique, se sont rendus jusqu’aux études de phase II, mais ils n’ont pas fait preuve d’une sélectivité suffisante. Selon la Dre Armstrong, le problème viendrait du fait que le domaine catalytique de la famille des JAK est grandement conservé. 

C’est pourquoi l’attention des chercheurs s’est tournée vers le domaine régulateur de la structure dimérique. En ciblant un domaine que ne possèdent pas les autres sous-types de JAK, le deucravacitinib et les autres inhibiteurs de la TYK2 actuellement en développement exercent très peu d’activité sur les autres sous-types de JAK. D’après la Dre Armstrong, la sélectivité du deucravacitinib en milieu expérimental est au moins 100 fois plus grande pour la TYK2 que pour la JAK3 et au moins 2000 fois plus prononcée que pour la JAK2. Cet avantage a une incidence à la fois sur son activité et son innocuité. 

Jusqu’à présent, des analyses similaires réalisées avec d’autres inhibiteurs allostériques et sélectifs de la TYK2 (NDI-034858 et VTX958) appuient cette hypothèse. Les études de phase II sur ces deux agents actuellement en développement sont terminées. Ils ont tous deux été reliés à une activité substantielle contre le psoriasis, mais aussi à une inhibition collatérale minime, voire nulle, d’autres JAK. Il est prévu de passer à la phase III des études avec ces deux agents, puisque les données probantes recueillies jusqu’ici montrent qu’ils pourraient bien être des traitements exploitables sur le plan clinique. 

Les inhibiteurs de la TYK2 en phase de développement, tout comme le deucravacitinib, « sont assortis d’un tableau d’innocuité compatible avec une inhibition extrêmement sélective de la TYK2 », a affirmé la Dre Armstrong. L’utilisation des inhibiteurs de la TYK2, homologués ou en phase de développement, n’aurait donné lieu à aucun signe d’incidents cardiovasculaires ou thrombotiques. On s’attend donc à ce que leur monographie ne comporte pas la mise en garde concernant le risque vasculaire, contrairement à celle des inhibiteurs de JAK moins sélectifs. 

Des effets indésirables peu fréquents

Au cours des études de phase III sur le deucravacitinib, le taux global d’effets indésirables était bas et comparable à celui enregistré avec le placebo et l’aprémilast. La rhinopharyngite et les infections des voies respiratoires supérieures étaient les effets indésirables les plus répandus dans tous les groupes de sujets. Pendant l’étude POETYK PSO-1, par exemple, ces effets indésirables ont été rapportés chez 25,4 % et 24,3 % des sujets traités respectivement par le deucravacitinib et l’aprémilast (vs 14,7 % dans le groupe placebo). Les céphalées (8,6 % vs 21,7 %), la diarrhée (7,3 % vs 17,6 %) et l’arthralgie (1,7 % vs 19,9 %) étaient moins fréquentes avec le deucravacitinib qu’avec l’aprémilast. Dans l’ensemble, les effets indésirables liés au traitement ont été plus rares chez les sujets traités par le deucravacitinib (33,1 %) que chez ceux ayant reçu l’aprémilast (46,9 %) ou le placebo (45,2 %). Pendant les 52 semaines de suivi, le zona a plus souvent été rapporté dans le groupe deucravacitinib (1,2 %) que dans le groupe aprémilast ou le groupe placebo (0 % pour les deux groupes), mais ce pourcentage reste faible en général. 

« Rien n’indiquait qu’il y ait eu une hausse du risque d’incidents cardiovasculaires majeurs ou de thrombo‑embolie veineuse dans l’une ou l’autre des études de phase III », a rapporté la Dre Armstrong. 

La Dre Armstrong a présenté les données collectées pendant la phase de suivi prolongée, qui montrent que les effets indésirables survenus pendant la deuxième année étaient généralement moins fréquents que durant la première. Seule exception au tableau hormis le taux plus élevé de COVID-19 : les infections respiratoires qui ont été plus répandues (figure 5). 

Les inhibiteurs de la TYK2 en phase de développement ont une plus grande sélectivité

Bien que les données relatives aux inhibiteurs allostériques et sélectifs de la TYK2 soient moins abondantes que celles portant sur le deucravacitinib, la Dre Armstrong a affirmé que le tableau d’innocuité dressé jusqu’à maintenant est très ressemblant. Elle a donné pour preuve les résultats d’une étude comparative menée avec le NDI-034858, où les taux d’infection étaient plus élevés avec cet agent qu’avec le placebo (14 % vs 0 %), mais les effets indésirables graves, peu fréquents. De même, le faible taux d’anomalies biochimiques cadrait avec celui observé avec le deucravacitinib pendant les études de phase III. « À 2 ans, on a relevé des anomalies biochimiques chez peu de patients traités par le deucravacitinib, et lorsqu’elles se produisaient, il y avait habituellement une raison », a-t-elle précisé. En cela, elle faisait référence notamment, au faible taux de hausses de la créatine kinase (CPK), qui après examen plus approfondi s’expliquait par un effort intense. 

Nouvel agent à prise orale offrant des avantages concrets

Le deucravacitinib est indiqué pour le traitement des formes modérées ou graves du psoriasis que les agents topiques ne parviennent pas à maîtriser de façon satisfaisante. Selon la Dre Stein Gold, le psoriasis est généralement considéré comme modéré ou grave quand il touche au moins 10 % de la surface corporelle ou qu’il provoque des lésions défigurantes, comme celles apparaissant au visage. En pareils cas, on peut envisager d’utiliser du deucravacitinib comme premier traitement à action générale ou après l’échec d’autres agents ciblés. 

D’après la Dre Stein Gold, l’absence de traitement à action générale antérieur, y compris par des agents biologiques, n’est pas une condition obligatoire. À preuve, les études de phase III ont confirmé l’efficacité du deucravacitinib lorsqu’il est employé en première ou en deuxième intention même si 60 % des participants avaient déjà été traités par des anticorps monoclonaux ou d’autres agents à action générale. 

La Dre Armstrong a laissé entendre qu’au lieu d’utiliser les inhibiteurs de la TYK2 avant les agents biologiques, on peut les employer comme solution de rechange valable aux agents biologiques. Elle a affirmé : « Avec les inhibiteurs de la TYK2, nous observons un niveau d’efficacité assez comparable à celui que nous obtenons avec les médicaments injectables. Lorsque je discute des diverses options avec mes patients, je m’assure de leurs préférences quant aux médicaments à prise orale ou injectables tout en leur parlant du tableau d’innocuité de ceux qui sont disponibles ».

« Avec les inhibiteurs de la TYK2, nous observons un niveau d’efficacité assez comparable à celui que nous obtenons avec les médicaments injectables. »

Pour la Dre Stein Gold, le deucravacitinib comporte plusieurs avantages concrets. Non seulement il s’administre par voie orale, ce que beaucoup de patients préfèrent selon elle, mais en plus, il n’est associé à aucune interaction médicamenteuse, ce qui en simplifie la prescription chez les patients atteints de plusieurs maladies concomitantes. Elle a souligné que le deucravacitinib s’administre une fois par jour, avec ou sans nourriture.

Si un patient choisit le deucravacitinib, la Dre Armstrong recommande de le lui faire subir un dépistage de la tuberculose et des épreuves fonctionnelles hépatiques afin d’établir ses valeurs de référence en cas d’hépatopathie confirmée ou soupçonnée, et de vérifier s’il a reçu tous les vaccins appropriés compte tenu de son âge, dont celui dirigé contre le zona. Bien qu’elle recommande de surveiller étroitement les patients suivant un traitement d’entretien par le deucravacitinib pour déceler la moindre maladie infectieuse, elle a précisé qu’il est inutile de les soumettre aux analyses biochimiques courantes sans motif valable. 

Dans l’ensemble, la sélectivité dont font preuve les inhibiteurs de la TYK2 pour maîtriser l’inflammation liée au psoriasis, qui a été validée lors des études cliniques réalisées avec le deucravacitinib, a aussi été étayée par les études en cours portant sur les inhibiteurs de la TYK2 en développement. 

Conclusion

Dans une mise à jour sur le rôle relatif de l’inhibition de la TYK2 dans la maîtrise du psoriasis, on a établi un parallèle entre la sélectivité du deucravacitinib, premier agent de sa classe thérapeutique, ses bienfaits cliniques et son innocuité. Fort d’une activité anti-psoriasique qui rivalise avec celle des médicaments injectables, cet agent tire surtout son avantage de sa sélectivité, une caractéristique ayant un lien avec son effet anti-inflammatoire et son tableau d’innocuité favorable. Maintenant qu’il est homologué au Canada, le deucravacitinib offrira une nouvelle option de traitement uniquotidien pour voie orale aux patients qui ne parviennent pas à maîtriser leur maladie au moyen d’agents topiques.

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