rhumatologie
Congrès annuel et symposium de formation de 2022 du GRAPPA
Progrès dans la prise en charge du rhumatisme psoriasique et actualisation des recommandations thérapeutiques du GRAPPA
Brooklyn – Les lignes directrices factuelles actualisées du GRAPPA (Group of Research and Assessment of Psoriasis and Psoriatic Arthritis) sur la prise en charge du rhumatisme psoriasique (RPso) ayant été publiées avant le congrès annuel de 2022, les points à retenir ont pu y être soulignés à grands traits, notamment l’éventail d’indications plus large accordé aux nouveaux antirhumatismaux de fond biologiques qui sont vus comme des traitements de première intention valables au même titre que les antirhumatismaux de fond de synthèse classiques ou ciblés. Il faut savoir que les inhibiteurs du facteur de nécrose tumorale (iTNF) et les inhibiteurs de l’interleukine-17 (iIL-17) sont les seuls agents qui y sont préconisés pour la prise en charge des six grands domaines d’expression de la maladie, que ce soit en première intention ou comme agent de remplacement.
Le RPso, dont l’incidence et la prévalence au Canada sont voisines de celles rapportées en Europe et aux États-Unis, est une maladie complexe, non seulement de par sa chronicité, mais aussi en raison de la diversité de ses manifestations pathologiques. Tenant compte de cette hétérogénéité, le GRAPPA a articulé ses nouvelles recommandations thérapeutiques autour des six domaines d’expression du RPso : l’arthrite périphérique, la spondylarthrite axiale, l’enthésite, la dactylite et les manifestations cutanées et unguéales de la maladie.
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Dans les nouvelles lignes directrices, les principes thérapeutiques fondamentaux sont passés de six à huit, le plus important étant de freiner au maximum le RPso dans ses six domaines d’expression; les autres objectifs sont l’optimisation de la capacité fonctionnelle et de la qualité de vie des patients. On y souligne également l’utilité pour la prise en charge du RPso des mesures de l’efficacité et de la tolérabilité thérapeutiques rapportées par les patients. Toute stratégie globale axée sur leur bien-être doit aussi viser la maîtrise de leurs maladies concomitantes, telles que la dépression, les maladies cardiovasculaires et les hépatopathies.
La nouvelle version des lignes directrices vs l’ancienne
La première version des lignes directrices du GRAPPA sur le RPso remonte à 2009; une version révisée a suivi en 2015. L’arsenal thérapeutique s’étant beaucoup enrichi depuis, des sous-comités du GRAPPA se sont employés à fouiller la littérature pour en extraire de nouvelles recommandations, leur version finale ayant reposé sur des données factuelles et sur le processus GRADE d’évaluation et de discussion de la solidité de ces données.
Résultat : plusieurs des antirhumatismaux de fond biologiques récents y sont fortement recommandés pour le traitement de première intention de plusieurs domaines d’expression du RPso. Or deux classes de médicaments seulement sont préconisées en première intention et comme solution de rechange ou de deuxième intention pour les six domaines à la fois : les iTNF et les iIL-17 (figure 1).
Si aucun des antirhumatismaux de fond biologiques récents hormis les iIL-17 n’a été jugé apte à traiter les six domaines d’expression du RPso, plusieurs d’entre eux sont préconisés dans le traitement de première intention de certains domaines. Par exemple, contrairement aux iIL-12/23, les iIL-23 sont recommandés contre l’arthrite périphérique ayant déjà été traitée par des antirhumatismaux de fond biologiques, mais aucune de ces deux classes n’est recommandée contre la spondylarthrite axiale.
Les iTNF et les iJAK (en plus des AINS et des analgésiques) sont fortement recommandés contre la spondylarthrite axiale, mais les données ne sont pas aussi probantes. Une seule étude de phase III portant expressément sur cette forme de RPso a fourni des données probantes de niveau 1 confirmant les effets positifs du sécukinumab, un iIL-17. Lors de cette étude contrôlée par placebo intitulée MAXIMISE, le risque relatif approché (RRO) calculé pour la réponse avec les doses de 150 mg ou de 300 mg était environ 4 fois plus élevé avec l’iIL-17 qu’avec le placebo (p < 0,0001 pour les deux doses).
Quant à l’arthrite périphérique, les iTNF et l’iIL-17 maîtrisent ses symptômes articulaires de façon comparable, mais l’iIL-17 fait preuve d’une plus grande activité contre l’atteinte cutanée, ce qui porte à croire que cet agent biologique est un choix particulièrement judicieux pour les patients affligés de lésions psoriasiques.
Les nouvelles recommandations du GRAPPA incitent à choisir les agents qui sont efficaces contre l’ensemble de ces domaines.
Le rôle relatif joué par ces agents au sein de leur classe pharmacologique respective témoigne de l’importance accordée au traitement personnalisé. Les médicaments offerts, même au sein d’une même grande classe, telle que les antirhumatismaux de fond biologiques ou ciblés, ne doivent pas être considérés comme interchangeables pour le traitement d’un domaine d’expression donné. Comme les patients affligés de RPso sont souvent aux prises avec plusieurs domaines d’expression de cette maladie, voire avec les six à la fois, les nouvelles recommandations du GRAPPA incitent à choisir les agents qui sont efficaces contre l’ensemble de ces domaines.
Le GRAPPA a également révisé certaines de ses recommandations sur d’autres aspects de la prise en charge des patients, notamment sur le moment et la façon de réduire graduellement les doses de médicament et les circonstances où il convient de recourir à des biosimilaires, mais la réorganisation des agents « fortement » recommandés est probablement la plus grande rupture avec la version antérieure.
Résumé
Les lignes directrices actualisées du GRAPPA, tout comme leur version antérieure, s’appuient sur une stratégie axée sur les domaines d’expression du RPso pour le choix des traitements. À la lumière des données probantes actuelles, elles soulignent que les options thérapeutiques les plus avancées ne peuvent être utilisées indifféremment pour l’un ou pour l’autre des domaines d’expression de la maladie. Les seuls agents qui sont fortement recommandés pour les 6 domaines sont les iTNF et les iIL-17. En outre, un iIL‑17 en particulier est la seule option qui soit étayée par des données probantes de niveau 1 dans le traitement de la spondylarthrite axiale.