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hématologie

53e réunion et exposition annuelles de l’American Society of Hematology (ASH)

Du 10 au 13 décembre 2011 / San Diego, Californie

La chimiothérapie de rattrapage chez les patients atteints d’un myélome multiple : de nouvelles options offrent de meilleurs résultats

San Diego – De nouveaux agents permettent aujourd’hui d’obtenir des améliorations notables de certains paramètres d’évaluation importants sur le plan clinique chez des patients atteints de myélome multiple ayant subi un grand nombre de traitements. Les études de Phase II et de Phase III présentées lors de la réunion annuelle de 2011 de l’American Society of Hematology (ASH) donnent à penser que ces nouveaux agents sont en mesure de raviver l’activité des agents que ces patients avaient reçus précédemment, d’où une amélioration importante sur le plan clinique de divers paramètres d’évaluation, tels que la survie sans progression de la maladie. Compte tenu de la tolérabilité acceptable de ces nouveaux agents, qui sont majoritairement administrés par voie orale, les données ainsi colligées permettent d’espérer que l’on parviendra à prolonger la survie des patients aux prises avec une forme réfractaire de la maladie.

De nouveaux agents sont chargés de promesses

« Le pronostic des patients aux prises avec un myélome multiple réfractaire a toujours été extrêmement sombre. À preuve, les chercheurs d’une étude réalisée récemment ont constaté que la survie sans complication médiane s’était chiffrée à cinq mois seulement chez des patients rebelles au bortézomib qui avaient fait une rechute et chez lesquels l’utilisation de la lénalidomide ou d’un autre agent immunomodulateur était exclue », a affirmé le DPaul G. Richardson, de l’Institut de traitement du cancer Dana-Farber, de Boston. Selon les données cliniques recueillies dans le cadre d’études récentes sur plusieurs nouveaux agents, y compris le vorinostat, le panobinostat, la pomalidomide et la périfosine, il est possible d’améliorer nettement les résultats obtenus même chez les patients atteints d’une forme avancée de myélome multiple.

L’une des stratégies les plus intensément étudiées à l’heure actuelle vise à raviver la sensibilité des patients au bortézomib en leur réadministrant cet agent en association avec un de ces nouveaux agents.

Le DRichardson a indiqué que l’une des stratégies les plus intensément étudiées à l’heure actuelle vise à raviver la sensibilité des patients au bortézomib en leur réadministrant cet agent en association avec un de ces nouveaux agents. Les taux de réponse au traitement impressionnants qui sont ainsi obtenus laissent présager une maîtrise prolongée de la maladie. Les données d’une étude de Phase III ayant porté sur le vorinostat, un inhibiteur des histones déacétylase (HDAC), ont été présentées lors de cette la réunion. Les chercheurs ont également présenté les données issues d’essais de Phase II réalisés avec le panobinostat (un autre inhibiteur des HDAC), la pomalidomide (un agent immunomodulateur) et la périfosine (un inhibiteur des voies de signalisation Akt et P13K).

L’étude PANORAMA 2 : la réaction à l’inhibiteur des HDAC

Lors de l’étude PANORAMA 2, les patients dont l’état avait progressé dans les 60 jours suivant le début de leur plus récent traitement à base de bortézomib ont été traités à l’aide de doses de 1,3 mg/m2 de ce médicament les 1er, 4e, 8e et 11jours d’un cycle de 21 jours et ont reçu par voie orale 20 mg de panobinostat les 1er, 3e, 5e, 8e, 10e et 12jours. Les cliniciens leur ont également administré de la dexaméthasone à 20 mg les jours où ils recevaient du bortézomib et le lendemain. Cette étude de Phase II se voulait la prolongation d’une étude de Phase I ayant porté sur le même schéma thérapeutique. Pour qu’un sujet soit jugé admissible à la Phase II, sa maladie devait s’être stabilisée ou atténuée tout au long des 8 cycles de traitement de la première étude.

« Au cours de l’étude de Phase I, le traitement s’est révélé actif chez beaucoup de sujets même si ces derniers avaient antérieurement été exposés à un nombre médian de 4 schémas thérapeutiques, l’un d’euxen ayant même reçu 14. Plus de la moitié des patients avaient reçu des greffes de cellules souches », a déclaré le Dr Richardson. Sur les 53 sujets recrutés dans l’étude de Phase I, environ 31 % participent maintenant à l’étude de Phase II (Tableau 1). La réponse de longue durée dont ils bénéficient est en rapport avec l’ampleur de leur réaction favorable initiale. La durée du traitement a été prolongée à près de 9 mois chez deux patients ayant obtenu une réponse quasi complète.

Selon le Dr Richardson, la plupart des effets indésirables de grades 3 et 4 étaient de nature hématologique. Les effets indésirables gastro-intestinaux de mêmes grades ont été peu fréquents et ceux de nature neuropathique, totalement inexistants. L’ampleur de l’activité thérapeutique alliée à un bilan d’innocuité acceptable est venue justifier la réalisation, par les investigateurs, d’un essai de Phase III (en cours) portant sur cette trithérapie.

L’étude VANTAGE 088 : la survie sans progression de la maladie

Au cours de l’étude internationale intitulée VANTAGE 088, 637 patients atteints d’une forme évolutive de myélome multiple, qui avaient déjà suivi trois schémas thérapeutiques au maximum, ont été répartis au hasard de manière à recevoir du vorinostat à 400 mg ou un placebo une fois par jour, du 1er au 14jour d’un cycle qui en comptait 21. Tous les patients ont reçu des doses types de bortézomib, soit 1,3 mg/m2 les 1er, 4e, 8e et 11e jours. Le principal critère d’évaluation de cette étude était la survie sans progression de la maladie (SSPM).

L’âge médian des patients s’élevait à 61 ans environ, mais approximativement 40 % d’entre eux avaient plus de 65 ans, ce qui est typique de la population atteinte de cette maladie. Il s’était écoulé 2,9 ans en moyenne depuis le début de leur premier traitement. À peu près les deux tiers des patients avaient reçu un agent immunomodulateur, comme la thalidomide ou la lénalidomide, et presque 80 % des patients avaient été traités au moyen d’un agent alcoylant. Environ la moitié des sujets s’était vu administrer de l’anthracycline, le tiers approximativement avait subi une greffe de cellules souches et le quart avait déjà été exposé au bortézomib.

Lors de cette étude, les chercheurs ont pu établir un lien entre l’association vorinostat-bortézomib et une prolongation de 23 % de la SSPM (7,63 vs 6,83 mois; RRI : 0,77; IC à 95 % : de 0,64 à 0,94; = 0,01) au cours des 25 mois de postobservation (Fig. 1).

Selon l’investigateur principal, le Dr Meletios A. Dimopoulos, du Département de thérapeutique, à l’Université d’Athènes, en Grèce, les données relatives à la survie globale, un critère d’évaluation secondaire, ne remontent pas suffisamment loin pour en tirer une conclusion, mais les chiffres sont prometteurs (RRI : 0,86; IC à 95 % : de 0,62 à 1,18; = 0,32). Comparativement à celle du bortézomib employé seul, l’activité du vorinostat allié au bortézomib s’est révélée nettement supérieure. Au total, le taux de réponse objective se chiffrait à 56 % versus 41 % (< 0,0001), tandis que le taux de bienfait clinique, qui englobait la stabilisation de la maladie, s’élevait à 71 % versus 54 % (< 0,0001) (Fig. 2). En outre, pour ce qui est du délai écoulé avant la progression de la maladie (DÉAPM), les chercheurs ont constaté une réduction du risque de 21 % dans le groupe traité par l’association médicamenteuse comparativement au groupe ayant reçu du bortézomib seulement (= 0,02).

La différence notée à l’avantage du vorinostat était significative sur le plan statistique, mais aussi sur le plan clinique. En plus d’une prolongation de la SSPM, nous avons constaté une prolongation significative du délai écoulé avant la progression de la maladie, a affirmé le Dr Dimopoulos. Tout comme ce que nous avons connu avec le bortézomib, nous croyons que nous assisterons à de nouveaux progrès au fur et à mesure que nous acquerrons de l’expérience et que nous peaufinerons les schémas thérapeutiques », a-t-il ajouté.

La tolérabilité

De l’avis du DDimopoulos, la portée du prolongement de la SSPM et du délai écoulé avant la progression de la maladie (DÉAPM) qui s’en est suivi sur le plan clinique a pris encore plus d’ampleur grâce à la tolérabilité du traitement. Il a en effet mentionné que les taux d’abandon pour cause d’effet toxique avaient été similaires chez les patients traités par l’association médicamenteuse et chez ceux ayant reçu le bortézomib seulement (21 % vs 22 %). En général, dans le groupe traité par l’association médicamenteuse, l’incidence des effets indésirables de grades 3 ou 4 n’était que très légèrement supérieure à celle observée chez les sujets ayant reçu du bortézomib en monothérapie. Ont fait exception la thrombocytopénie (45 % vs 24 %), la diarrhée (17 % vs 9 %) et la fatigue (17 % vs 7 %). Le DDimopoulos a ajouté qu’il était remarquable que des effets indésirables neuropathiques de grades 3 et 4 aient été observés chez 8 % des sujets de chaque groupe seulement.

L’étude VANTAGE 095 : une majoration encourageante des taux de survie

Lors de l’étude VANTAGE 088, 60 % des patients des deux groupes étaient toujours en vie deux ans après avoir entrepris leur traitement, un pourcentage qui laisse entrevoir les progrès énormes réalisés dans les formes avancées de la maladie comparativement aux taux historiques. D’autres données encourageantes sur la survie des patients sont ressorties de l’étude VANTAGE 095, une étude de Phase IIB d’envergure mondiale fondée sur un protocole de traitement similaire, mais réservée aux patients réfractaires au bortézomib, se sont également révélés encourageants. Tous les patients ont en effet reçu les mêmes doses de bortézomib et de vorinostat que celles utilisées pendant l’étude VANTAGE 088. Les patients dont l’état était resté le même ou dont la maladie avait évolué après quatre cycles de traitement ont pris de la dexaméthasone à 20 mg les jours où ils recevaient le bortézomib ainsi que les lendemains.

Au cours de cette étude, le taux de réponse objective s’est établi à 17 %, mais le taux de bienfait clinique grimpait à 77 % lorsque les sujets dont la maladie s’était stabilisée étaient pris en compte dans l’analyse. La durée médiane des réponses objectives était de sept mois. Le taux de survie à un an s’élevait à 44 % et celui à deux ans, à 32 %, soit des pourcentages beaucoup plus élevés que ceux qui sont généralement observés dans cette population de patients, a fait remarquer le Dr David S. Siegel, du Centre médical de l’université Hackensack, dans la ville du même nom, au New Jersey (Fig. 3). L’avantage conféré par le vorinostat a continué d’être observé même après que la population de patients ait été stratifiée de toutes sortes de manières (Tableau 2).

Le Dr Siegel a affirmé : « Les patients ayant subi maints traitements antérieurs ont généralement bien toléré l’association médicamenteuse, 27 % d’entre eux ayant pu recevoir au moins huit cycles de traitement ». Il a ajouté que 19 % des patients seulement ont interrompu leur traitement pour cause d’effets toxiques. Encore là, l’effet indésirable de nature hématologique de grades 3 ou 4 le plus fréquent a été la thrombocytopénie (68 %). Une anémie et une neutropénie de grades 3 ou 4 ont été observées chez 38 % et 32 % des sujets, respectivement. Les seuls effets indésirables non hématologiques de grades 3 ou 4 signalés chez plus de 10 % des patients ont été la diarrhée (17 %) et la fatigue (13 %).

Un agent immunomodulateur permet d’obtenir des améliorations

La possibilité que les nouveaux médicaments permettent de prolonger la survie des patients ayant subi de nombreux traitements pour un myélome multiple a également été documentée lors d’une étude de Phase II ayant reposé sur l’administration de pomalidomide à des patients aux prises avec une forme réfractaire de cette maladie. Quatre-vingt-quatre patients ont été répartis au hasard de manière à recevoir un des deux traitements selon des cycles de 28 jours. L’un d’eux consistait à administrer 4 mg de pomalidomide par voie orale 21 jours sur 28, ainsi que 40 mg de dexaméthasone une fois par semaine. L’autre prévoyait l’administration de doses identiques de pomalidomide par voie orale et de dexaméthasone, sauf que la pomalidomide était administré tous les jours du cycle. Cette étude était réservée aux patients qui, au mieux, avaient obtenu une stabilisation de leur maladie ou dont la maladie s’était antérieurement montrée réfractaire à des traitements par le bortézomib et la lénalidomide. Parmi les patients recrutés, 69 % étaient réfractaires à la fois au bortézomib et à la lénalidomide. En outre, leur maladie avait évolué lors de leur dernier traitement. Le critère d’évaluation principal de cet essai était le taux de réponse objective.

« L’activité médicamenteuse était impressionnante », a déclaré le Dr Xavier Leleu, du Service des maladies du Sang de l’Hôpital Claude Huriez, du CHRU de Lille, en France. Plus précisément, nous avons obtenu des réponses objectives chez 34,9 % des sujets traités par la pomalidomide durant 21 jours de chaque cycle et chez 34,1 % de ceux qui la recevaient pendant les 28 jours. Il s’agissait majoritairement de réponses partielles, mais il faut savoir que la SSPM médiane s’est chiffrée à 6,3 mois et la durée médiane de la réponse s’est établie à 11,4 mois dans les groupes recevant la pomalidomide pendant 21 jours de chaque cycle. La SSPM était de 4,2 mois chez les sujets dont la maladie était stable et de 12,6 mois chez ceux ayant obtenu une réponse objective.

« Cette étude nous a apporté de nouvelles preuves que la pomalidomide est dépourvu de résistance croisée avec le lénalidomide », a affirmé DLeleu, ce qui concorde avec les données expérimentales et cliniques recueillies précédemment. Il a tenu à ajouter que des essais avec répartition aléatoire des sujets seront probablement réalisés avec ce médicament.

Pleins feux sur les inhibiteurs des voies de signalisation Akt et P13K

Le Dr Richardson a également présenté les résultats d’une étude de Phase I/II sur la périfosine, un agent administré par voie orale, qui agit sur plusieurs voies de transmission des signaux, y compris celles où interviennent les protéines JAK2, Akt et NF-κB. Des doses quotidiennes de 50 mg de ce médicament ont été administrées en association avec la dose type de bortézomib. Les sujets recevaient également des doses de 20 mg de dexaméthasone les jours où le bortézomib était administré ainsi que le lendemain. Tous les sujets avaient subi maints traitements (nombre médian de schémas thérapeutiques : 5) et s’étaient montrés réfractaires au bortézomib ou avaient fait une rechute après y avoir été exposés.

« Le taux de réponse objective calculé pour les 73 patients dont la réponse était évaluable s’élevait à 41 % et le taux de réponse complète, à 4 %, a rapporté le Dr Richardson. Chez les 53 patients précédemment réfractaires au bortézomib, le taux de réponse objective se chiffrait à 32 % et le taux de réponse complète, à 2 %. Une réponse a été objectivée chez 65 % des 20 sujets qui avaient fait une rechute après avoir subi un traitement par le bortézomib; deux sujets ont manifesté une réponse complète ». Le Dr Richardson a tenu à préciser que si la SSPM était de 6,4 mois, il n’en demeurait pas moins que la plus longue avait été supérieure à 3 ans.

Qualifiant la toxicité de l’agent de « raisonnable », le Dr Richardson a mentionné que la plupart des effets indésirables ont été imputés au bortézomib. Il a ajouté que des chercheurs effectuent présentement un essai de Phase III avec répartition aléatoire des sujets sur ce schéma thérapeutique dans le but d’en confirmer l’efficacité.

Conclusion

Les nouvelles options de traitement dirigées contre le myélome multiple s’étendent maintenant aux patients en situation de rechute ou d’insensibilité aux traitements. Si les traitements utilisés en première intention ont permis de prolonger considérablement la survie des patients tout en leur offrant une qualité de vie acceptable, la découverte de médicaments qui font preuve d’activité contre la maladie même chez les patients ayant déjà subi maints traitements porte à croire qu’il est possible de prolonger encore plus les périodes de survie sans progression de la maladie. Les participantsà la réunion de l’ASH ont pu constater que plusieurs traitements utilisés dans les cas de myélome multiple rebelle sont prometteurs.

Déclaration

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