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Revue d’experts

Les 5 dermopathies les plus courantes en médecine de première ligne

Dermatologie

Chapitre 4: L’impétigo

Directeur scientifique invité
Simon Nigen, M.D.

Questions et réponses : le point de vue d’un allergologue
Jason K. Lee, M.D., FRCPC, FAAAAI, FACAAI

L’impétigo est une infection bactérienne de la peau superficielle qui se voit surtout chez les enfants. Il est rare de l’observer chez les adolescents et les adultes en l’absence de lésions cutanées préexistantes imputables, par exemple, à une abrasion ou à une dermatite. L’impétigo croûteux, la plus répandue des deux formes de cette affection, se caractérise par des lésions croûteuses et jaunâtres. Chez les enfants, les lésions touchent souvent la région périorale, mais elles peuvent apparaître partout sur le corps. Comme son nom l’indique, l’impétigo bulleux provoque l’apparition de bulles fragiles qui laissent échapper un liquide jaunâtre une fois rompues. Elles apparaissent le plus souvent sur le tronc, les membres ou les plis cutanés, comme les aisselles ou les fesses.

L’impétigo est extrêmement répandu chez les jeunes enfants. À preuve, sa prévalence mondiale est estimée à 12,3 %. Il est généralement plus fréquent dans les régions tropicales et pauvres que dans les régions au climat tempéré. Toutefois, une prévalence frôlant les 20 % a été rapportée chez les enfants des milieux défavorisés vivant dans des pays riches, dont le Canada. L’impétigo guérit rapidement sans laisser de cicatrices même en l’absence de tout traitement, mais les applications locales d’antibiotiques peuvent en accélérer la guérison et réduire le risque de transmission. Les atteintes générales et les complications sont habituellement rares, mais l’impétigo causé par Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM) peut être grave s’il n’est pas pris en charge rapidement.

Physiopathologie

L’impétigo, une maladie extrêmement contagieuse, est causé par la prolifération de bactéries qui colonisent la peau saine. Un streptocoque du groupe A et S. aureus sont les agents pathogènes les plus souvent incriminés dans les cas d’impétigo croûteux et d’impétigo bulleux, respectivement1,2. Plusieurs facteurs peuvent favoriser la prolifération bactérienne, notamment une mauvaise hygiène et des défenses immunitaires affaiblies. Les sujets plus âgés ne contractent ordinairement la maladie que si leur barrière épidermique est compromise par d’autres facteurs comme une piqûre d’insecte ou une plaie qui servent de porte d’entrée à l’invasion et à la prolifération de bactéries. Dans les cas où l’épiderme est lésé, on parle alors d’impétigo secondaire.

L’impétigo croûteux, qui est en cause dans 70 % des cas environ5, entraîne la formation de vésicules à paroi mince qui, lorsqu’elles éclatent, laissent échapper leur contenu qui forme ensuite une croûte mélicérique2. Les lésions propres à l’impétigo bulleux, qui est moins fréquent, sont causées par les toxines produites par les bactéries envahissantes6. Les caractéristiques physiopathologiques des deux types d’impétigo seraient similaires. Dans la majorité des cas, l’hygiène joue un rôle dans l’acquisition et la transmission de la maladie7

Diagnostic 

Le diagnostic de l’impétigo se fait à partir de l’examen clinique. Bien que cette maladie soit causée par des bactéries, les frottis cutanés ne sont d’aucune utilité pour poser un diagnostic, puisqu’ils ne font pas de distinction fiable entre les micro-organismes infectieux et ceux qui sont des commensaux de la peau8 (Fig. 1). Le traitement de première intention peut être amorcé à la lumière d’un diagnostic de probabilité sans qu’il soit nécessaire d’identifier le pathogène en cause, mais s’il échoue, l’étape suivante devrait être la mise en culture du pus ou du contenu des vésicules. 

Le diagnostic différentiel varie en fonction de l’aspect bulleux ou croûteux des lésions. Pour ce qui est de la forme croûteuse, la liste comprend des maladies inflammatoires comme l’eczéma atopique, la dermatite de contact et le lupus érythémateux discoïde, en plus d’autres types d’infections, dont l’herpès simplex, la candidose cutanée et la gale sarcoptique humaine. Cette dernière, dont un des facteurs de risque est aussi une mauvaise hygiène, est celle qui produit le plus souvent des lésions prurigineuses dont l’aspect et la topographie ressemblent à ceux de l’impétigo lorsque le grattage a été intensif, mais les galeries creusées par les acariens signent la maladie9.

Traitement

Nous ne disposons pas de lignes directrices récentes sur la prise en charge de l’impétigo, mais l’Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé (ACMTS), un organisme sans but lucratif, a publié un rapport de synthèse sur le rôle des antibiotiques topiques comme traitement de première intention10. Cette analyse de revues systématiques et de méta-analyses a amené ses auteurs à conclure que la mupirocine et l’acide fusidique utilisés en applications locales sont tout aussi efficaces l’une que l’autre, mais que les données probantes sont insuffisantes pour confirmer l’efficacité de la bacitracine. Ils ont également constaté que la mupirocine topique est au moins aussi efficace que l’érythromycine, la dicloxacilline, la céphalexine et l’ampicilline. En outre, il est ressorti d’une revue systématique Cochrane que la mupirocine, l’acide fusidique et l’ozénoxacine font preuve d’une efficacité équivalente tout en étant plus efficaces que les antibiotiques pour voie orale11. Bien qu’il soit recommandé d’inciser et de vider les abcès pour améliorer la pénétration des antibiotiques topiques dans la peau des patients atteints d’impétigo12, il faut savoir que ces agents comportent un avantage certain : ils risquent peu de provoquer des effets indésirables généraux  (Fig. 2).

Les antibiotiques pour voie orale semblent réservés aux situations où un traitement local est irréalisable ou dans les cas où les lésions sont très étendues2. Il peut être justifié d’avoir recours à ces médicaments et aux autres solutions de rechange aux agents topiques utilisés en première intention si on soupçonne la présence de micro-organismes résistants. Notons qu’une hausse de la prévalence de SARM, de streptocoques résistant aux macrolides et de streptocoques résistant à la mupirocine a été rapportée13. Chez les patients réfractaires aux antibiotiques employés en première intention, qui deviennent fiévreux ou qui éprouvent d’autres symptômes généraux, il serait bon d’envisager de recourir à des agents à spectre relativement large, comme la doxycycline, l’association triméthoprime-sulfaméthoxazole (TMP/SMX) et la clindamycine2. Tous ces produits protègent à tout le moins modestement contre les SARM, mais l’association TMP/SMX est peu efficace contre les staphylocoques. Les tableaux de résistance aux antibiotiques topiques peuvent faciliter la prise de décisions thérapeutiques dans les cas où l’antibiorésistance est un sujet d’inquiétude.

Les antibiotiques topiques, peu importe lequel est choisi, doivent être appliqués 3 fois par jour pendant 7 à 12 jours. Il faut évaluer la réaction à ce traitement au bout de 3 à 5 jours et changer de médicament si les lésions n’ont pas commencé à guérir. Les antibiotiques pour voie orale doivent être administrés selon les schémas posologiques habituels pendant 7 jours.  

Les flambées d’impétigo sont fréquentes dans les garderies ou dans les autres endroits où se côtoient de jeunes enfants, d’où l’importance de poser un diagnostic, de traiter et d’isoler rapidement les enfants touchés afin de réduire le risque de contagion. 

Résumé

Même si l’impétigo est, dans la plupart des cas, une infection bactérienne superficielle de la peau spontanément résolutive, il est possible d’en accélérer la guérison et d’éviter la contagion en posant un diagnostic et en instaurant le traitement rapidement. Le plus souvent, la forme croûteuse de la maladie se manifeste par des lésions vésiculaires laissant une croûte mélicérique sur la face et les membres. Elle est généralement causée par la prolifération de S. aureus ou de S. pyogenes. Moins répandue, la forme bulleuse est habituellement causée par un streptocoque. L’antibiothérapie topique est le traitement privilégié contre les deux formes d’impétigo. Il convient d’avoir recours aux antibiotiques pour voie orale lorsque l’emploi d’antibiotiques topiques est irréalisable, lorsque la maladie est étendue ou en présence de symptômes généraux, surtout si on soupçonne l’implication de pathogènes antibiorésistants. 

L’impétigo : le point de vue d’un allergologue

Jason K. Lee, M.D., FRCPC, FAAAAI, FACAAI
Immunologie et allergologie cliniques, Médecine interne
Toronto Allergy and Asthma Clinic
Toronto (Ontario)

1. L’impétigo doit-il être vu comme une maladie allergique ou dermatologique?

L’impétigo est une infection bactérienne. En général, les lésions croûteuses risquent peu d’être confondues avec celles provoquées par une réaction d’hypersensibilité prurigineuse. Le diagnostic différentiel comporte plutôt d’autres dermatopathies infectieuses comme l’herpès. Les patients aux prises avec un eczéma atopique sont plus exposés aux infections cutanées superficielles comme l’impétigo, habituellement en raison d’un dérèglement du système immunitaire cutané. 

2. Dans quelles circonstances est-il bon d’orienter un patient atteint d’impétigo vers un spécialiste?

Les agents antibactériens topiques sont efficaces dans la plupart des cas d’impétigo, celui-ci guérissant en peu de temps. Il convient d’adresser un patient surtout si le diagnostic est incertain ou si les lésions ne disparaissent pas rapidement malgré un traitement adapté.

3. Si les patients ne répondent pas au traitement de première ou de deuxième intention contre l’impétigo, quel spécialiste vaudrait-il mieux consulter? Un dermatologue? Un allergologue?

L’impétigo est une maladie infectieuse qui peut être facilement prise en charge par les médecins de première ligne. Même s’il est important d’envisager la possibilité que les patients qui ne répondent pas aux traitements de première intention soient infectés par un micro-organisme résistant, notamment le SARM, ceux qui sont affligés d’une infection grave et évolutive doivent être orientés vers un infectiologue ou vers un dermatologue ou un allergologue si le diagnostic en est un d’incertitude.

Diapositives Additionnelles

(fig. 3)

Références

1. KOSAR, L. et T. Laubscher. « Management of impetigo and cellulitis: Simple considerations for promoting appropriate antibiotic use in skin infections », Can Fam Physician, vol. 63, 2017, p. 615-618.

2. HARTMAN-ADAMS, H., C. Banvard et G. Juckett. « Impetigo: diagnosis and treatment », Am Fam Physician, vol. 90, 2014. p. 229-235.

3. BOWEN, A.C., A. Mahe, R.J. Hay, et al. « The Global Epidemiology of Impetigo: A Systematic Review of the Population Prevalence of Impetigo and Pyoderma », PLoS One, 2015, p. 10:e0136789.

4. PEEBLES, E., R. Morris et R. Chafe. « Community-associated methicillin-resistant Staphylococcus aureus in a pediatric emergency department in Newfoundland and Labrador », Can J Infect Dis Med Microbiol, vol. 25, 2014, p. 13-16.

5. COLE, C. et J. Gazewood. « Diagnosis and treatment of impetigo », Am Fam Physician, vol. 75, 2007, p. 859-864.

6. AMAGAI, M., T. Yamaguchi, Y. Hanakawa, K. Nishifuji, M. Sugai et J.R. Stanley. « Staphylococcal exfoliative toxin B specifically cleaves desmoglein 1 », J Invest Dermatol, vol. 118, 2002, p. 845-850.

7. LUBY, S.P., M. Agboatwalla, D.R. Feikin, et al. « Effect of handwashing on child health: a randomised controlled trial », Lancet, vol. 366, 2005, p. 225-233.

8. GEORGE, A. et G. Rubin. « A systematic review and meta-analysis of treatments for impetigo », Br J Gen Pract, vol. 53, 2003, p. 480-487.

9. CHANDLER, D.J. et L.C. Fuller. « A Review of Scabies: An Infestation More than Skin Deep », Dermatology, vol. 235, 2019, p. 79-90.

10. ACMTS. « Les antibiotiques topiques dans le traitement de l’impétigo : efficacité clinique et lignes directrices, https://www.cadth.ca/fr/les-antibiotiques-topiques-dans-le-traitement-de-limpetigo-efficacite-clinique-et-lignes-directrices.

11. KONING, S., R. van der Sande, A.P. Verhagen, et al. « Interventions for impetigo », Cochrane Database Syst Rev, vol. 1, 2012, CD003261.

12. STEVENS, D.L., A.L. Bisno, H.F. Chambers, et al. « Practice guidelines for the diagnosis and management of skin and soft tissue infections: 2014 update by the Infectious Diseases Society of America », Clin Infect Dis, vol. 59, 2014, p. e10-e52.

13. BANGERT, S., M. Levy et A.A. Hébert « Bacterial resistance and impetigo treatment trends: a review », Pediatr Dermatol, vol. 29, 2012, p. 243-248. 

 

 

Déclaration

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Chapitre 4: L’impétigo

L’impétigo est une infection bactérienne de la peau superficielle qui se voit surtout chez les enfants. Il est rare de l’observer chez les adolescents et les adultes en l’absence de lésions cutanées préexistantes imputables, par exemple, à une abrasion ou à une dermatite. L’impétigo croûteux, la plus répandue des deux formes de cette affection, se caractérise par des lésions croûteuses et jaunâtres. Chez les enfants, les lésions touchent souvent la région périorale, mais elles peuvent apparaître partout sur le corps. Comme son nom l’indique, l’impétigo bulleux provoque l’apparition de bulles fragiles qui laissent échapper un liquide jaunâtre une fois rompues. Elles apparaissent le plus souvent sur le tronc, les membres ou les plis cutanés, comme les aisselles ou les fesses.

L’impétigo est extrêmement répandu chez les jeunes enfants. À preuve, sa prévalence mondiale est estimée à 12,3 %. Il est généralement plus fréquent dans les régions tropicales et pauvres que dans les régions au climat tempéré. Toutefois, une prévalence frôlant les 20 % a été rapportée chez les enfants des milieux défavorisés vivant dans des pays riches, dont le Canada. L’impétigo guérit rapidement sans laisser de cicatrices même en l’absence de tout traitement, mais les applications locales d’antibiotiques peuvent en accélérer la guérison et réduire le risque de transmission. Les atteintes générales et les complications sont habituellement rares, mais l’impétigo causé par Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM) peut être grave s’il n’est pas pris en charge rapidement.

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